vendredi 11 mai 2012
LES INROCKS - Essai poétique et buissonnier, un film précieux
Balade poétique en lorraine, à travers la mémoire des Maghrébins employés dans la sidérurgie.
Un essai poétique et buissonnier dans lequel Abdallah Badis, fils d" ouvrier sidérurgiste en Lorraine, ayant suivi la même voie avant de devenir comédien et metteur en scène de théâtre, évoque in situ son enfance
et la noria des immigrés algériens venus dans la région pour échapper à la misère.
Le film suit des chemins détournés, jouant avec les hasards concertés pour faire resurgir la mémoire, celle d'un peuple déraciné et exploité, et celle d'une famille issue de ce peuple. Le fil rouge de ce documentaire mis en scène,
où les paroles sont vraies mais où Les situations sont inventées, est la réparation d'une 404 Peugeot. auto symbole de l'immigration maghrébine, trophée de la réussite sociale brandi par les expatriés de retour au bled.
Le cinéaste, qui est aussi le protagoniste principal, rencontre un homme dont la 404 est en panne. La voiture devient prétexte
à des rencontres et à des discussions entre anciens ouvriers sidérurgistes. Parallèlement, Badis arpente les chemins (noirs) de son enfance, traverse les friches industrielles, y retrouve des fantômes ou les invoque. Une usine désaffectée abrite une salle de boxe. Un autre de ces lieux est devenu un casino, dont le cinéaste affuble les passants de masques inquiétants de Mickey.
Une promenade mélancolique où l'on rappelle des souvenirs précis, corroborés par des images d'archives, et aussi où l'on décale la réalité.
Un de ces films précieux à la croisée des genres et des catégories; très loin
du documentaire brut de décoffrage mais aussi de la fiction romanesque. Celle remémoration en douceur, qu'on pourrait qualifier de proustienne pour simplifier, est une sorte d'élégie, un tombeau, au sens littéraire, où l'on célèbre avec une mélancolie mêlée de nostalgie le sacrifice des Algériens devenus chair à canon de la
sidérurgie.
Vincent Ostria -les inrockuptibles-
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire